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Allemagne et France 2020-21

Reprise économique

Martin Vogler

© Shutterstock

15 septembre 2021

Au début de la pandémie du coronavirus, les gouvernements français et allemand ont opté pour des stratégies très différentes pour lutter contre les effets économiques. Au départ, l’Allemagne semblait tout mieux faire. Mais une fois la situation légèrement normalisée, le constat est surprenant.

« Pics historiques » dans les bourses

Le développement économique des deux pays a presque lieu à l’unisson – et s’améliore à nouveau nettement. Les bourses le reflètent particulièrement. Après l’effondrement simultané des cours dans les deux pays en mars 2020, elles affichent depuis, avec les fluctuations habituelles, une tendance à la hausse. Le Deutscher AktienindeX (DAX, indice boursier allemand), avec ses 30 entreprises, a par exemple augmenté de près de 5 % le jour de novembre 2020 où les premiers espoirs concrets en termes de vaccin sont nés. Au début de l’année 2021, les investisseurs DAX semblaient même gagner toujours plus en confiance. L’index a connu de nouveaux records innombrables, ce que les boursiers ont appelé, pas tout à fait correctement, des « pics historiques ». La bourse évoluait presque comme si le coronavirus n’avait jamais existé. Depuis l’effondrement lié à l’épidémie en mars 2020, les cours allemands ont presque doublé en un an et demi environ.

En France, l’évolution de l’indice boursier Cotation Assistée en Continu (CAC), qui concerne les 40 entreprises au chiffre d’affaires le plus élevé, est similaire lors de la phase du coronavirus. Il a fallu environ 12 mois, soit un peu plus longtemps qu’en Allemagne, pour rattraper l’effondrement du cours de mars 2020, ce qui était cependant loin de représenter, contrairement à outre-Rhin, un niveau record absolu. La France l’a seulement réussi à la fin du premier semestre de 2021, lié au fait que l’index boursier français n’a plus atteint son niveau record de septembre 2000 depuis plus de deux décennies. En effet, l’économie française s’essouffle depuis le passage au nouveau millénaire et est donc boudée par les investisseurs. Une circonstance qui n’a pas grand-chose à voir avec la pandémie, mais qui, en raison de la mauvaise situation économique, n’a pas facilité les mesures du gouvernement français lors de la phase du coronavirus.

PIB et BIP

Un problème essentiel de l’économie française est la part faible des exportations. Cela se voit clairement lorsqu’on observe le produit intérieur brut (PIB) de 2020 : le pourcentage de marchandises du PIB exporté de France était seulement de 19,7 %, alors que le « spécialiste mondial de l’exportation », l’Allemagne, était à 35,8 % : « L’Allemagne exporte des marchandises, la France des emplois », comme le disent les mauvaises langues. Cette part faible des exportations joue également un rôle dans le fait que la France, économiquement plus faible, a été plus fortement touchée au début de la crise du coronavirus que son voisin d’outre-Rhin.

En outre, l’effondrement du départ a eu un impact plus important en France, car le gouvernement français a tenté de limiter l’épidémie en introduisant des mesures plus dures que l’Allemagne, comme des couvre-feux : les personnes qui doivent rester chez elles consomment moins. La France en a été fortement touchée, car l’économie y dépend particulièrement du secteur des services.

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La production industrielle a en revanche moins souffert du coronavirus que la gastronomie, l’hôtellerie ou les coiffeurs par exemple. Le pourcentage de la valeur ajoutée brute industrielle du PIB est très faible en France, avec 13,5 % (état 2019). En comparaison : dans l’Union européenne, la valeur en 2019 était d’environ 20 %, et de 24,3 % en Allemagne. Les chiffres dramatiques de la production industrielle en France montrent également que le nombre d’emplois y a été réduit de moitié depuis 1980, pour chuter à seulement 2,2 millions. Point amer pour la politique française : le gouvernement avait réussi pour la première fois en 2019 à créer de nouveaux emplois plus concurrentiels dans l’industrie. Le coronavirus a fait dépérir cette plante fragile.

Or, le produit intérieur brut français s’est fortement effondré au début de la crise du coronavirus. Le deuxième trimestre de 2020 a terminé avec un recul de 13,2 %, un chiffre disproportionné en comparaison avec le reste de l’Europe. En Allemagne, il a seulement chuté de 9,7 %. Mais au troisième trimestre, une chose surprenante a eu lieu : le PIB français est remonté en flèche, même plus qu’en Allemagne.

Depuis le passage de l’année 2020 à 2021, les deux pays évoluent à peu près à l’unisson. Détail intéressant : malgré des dispositifs différents, surtout au départ, pour contrer les effets économiques de la pandémie, la plupart des indicateurs tels que la consommation privée, le développement économique, le chiffre d’affaires de la gastronomie ou la tendance des prix, évoluent dans les deux pays de manière similaire. Le taux de chômage a beau être deux fois plus faible en Allemagne qu’en France, c’est le cas depuis des décennies déjà. Le rapport n’a pas particulièrement changé en raison du coronavirus.

Interventions de l’État en France et outre-Rhin

Les deux États ont lancé d’énormes programmes d’aide pour les secteurs fortement touchés par la pandémie. Rien que jusqu’à fin mars 2021, la France a dépensé environ 206 milliards d’euros pour le chômage partiel, les garanties de crédit, les aides immédiates et les reports de paiement. Pour l’Allemagne, le ministère de l’Économie indique des chiffres plus faibles : le montant s’élève à 106 milliards jusqu’à fin mai 2021. À cela s’ajoutent en France des programmes sectoriels, par exemple pour encourager la compétitivité et la durabilité. Au total, la France, une fois la crise entièrement passée, devrait avoir dépensé plus de 300 milliards.

En Allemagne, la somme augmente également. Mais une transparence totale ne sera pas possible, notamment en raison des nombreux termes tels qu’aides immédiates, aides transitoires, aides de redémarrage, mesures spéciales, et la part de garanties présente partout. Et nul ne peut dire avec certitude si un programme n’aurait pas également été mené sans le coronavirus. Les soutiens financiers de l’Union européenne, contestés par le milieu politique et économique, devraient en tout cas aider les États de l’UE.

En ce qui concerne le chômage partiel, on a d’abord observé de grands écarts : la France était très généreuse. Les personnes au chômage partiel recevaient 100 % de leur salaire net et les employeurs étaient également entièrement indemnisés. Plus tard, ces valeurs ont été réduites progressivement pour atteindre un niveau similaire à celui de l’Allemagne. Avec la poursuite de la pandémie, la France a changé de cap dans un des domaines : en se basant sur le modèle allemand, elle a également introduit un chômage partiel de longue durée. Et dans les deux pays, les entreprises qui auraient dû déclarer leur insolvabilité ont pu la reporter. Une mesure vue avec beaucoup de scepticisme de la part de nombreux experts, car le report empêche rarement l’étape difficile de l’insolvabilité.

En règle générale, on peut se demander à quel point de telles interventions de l’État sont pertinentes pour l’économie. En effet, en reportant le droit d’insolvabilité, les gouvernements maintiennent en vie des entreprises en difficultés. Elles soutiennent même des grandes entreprises dans des dimensions inimaginables jusqu’ici. Personne ne connait les effets des mesures pour la dette publique à l’avenir. Mais une chose est sûre : les critères de Maastricht qui avaient été adoptés de manière contractuelle ne peuvent plus être respectés. Ils indiquent que les États peuvent s’endetter à maximum 60 % de leur produit intérieur brut. À la fin de l’été 2021, la dette de la Grèce était à plus de 200 %. En Belgique, en France, en Italie, au Portugal, en Espagne et à Chypre, elle était à plus de 100 %. Les aides liées au coronavirus y ont joué sans aucun doute un rôle considérable.

Dans cette situation, les opposants aux interventions massives de l’État dans l’économie de marché se réfèrent souvent à l’ancien ministre de l’Économie et chancelier allemand Ludwig Erhard. Il se retournerait dans sa tombe, car l’un de ses principes directeurs était : « Un système économique libéral peut uniquement perdurer si un niveau maximal d’initiative privée est garanti. » Et pour lui, cela s’appliquerait probablement aussi lors d’une pandémie.

Traduction : Amélie Gärtner

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