Société civile franco-allemande
Une nouvelle culture de la coopération

Société civile franco-allemande  Une nouvelle culture de la coopération
  • VeröffentlichtDezember 15, 2020

L’Europe de l’avenir doit se baser sur la coopération de la société civile allemande et française. Il s’agit de la coopération la plus étroite de deux pays sur le continent européen. Et la plus subventionnée. Un état des lieux et des propositions pour l’avenir.

« Souvent, nous avons du mal à nous comprendre », explique Claire Demesmay, responsable du programme France de la Deutsche Gesellschaft für Auswärtige Politik (DPAG) à Berlin. Elle siège depuis plusieurs années en Allemagne et selon elle, les Allemands et Français pensent souvent de manière totalement différente : « C’est une erreur de penser que tout fonctionne. Nous ne devons jamais surestimer ces bonnes relations. »

Entretien et développement continus

En tout cas, comme l’indique l’experte, elles ont besoin d’un entretien et d’un développement continus. C’est également ce que pense Andreas Weber de la Baden-Württemberg Stiftung, qui a initié il y a peu le programme Nouveaux Horizons : celui-ci se base sur des expériences dans la région du Danube, s’oriente aux acteurs de la société civile et souhaite faciliter les rencontres. Le programme dispose notamment d’un seuil de demande très bas, afin de motiver également des initiatives civiles plus petites.

Même si l’intérêt pour le pays voisin semble faiblir, comme le montrent les chiffres en baisse de jeunes gens qui apprennent la langue du pays voisin, et que les différentes mentalités posent un défi de communication, une coopération étroite offre de grandes opportunités pour la cohésion européenne. « Les relations sont tellement bonnes que l’Allemagne et la France pourraient servir de modèle pour le rapprochement d’autres États en Europe », indique Julien Thorel, expert en relations franco-allemandes pour le think tank européen Centre de politique européenne (CEP).

L’importance de la société civile

Depuis quelque temps, l’importance de la société civile pour cette cohésion est davantage prise en compte. Lors de l’élaboration du traité d’Aix-la-Chapelle, que la chancelière Angela Merkel et le président Emmanuel Macron ont signé en mars 2019 comme complément au traité de l’Élysée de 1963 relatif à l’amitié franco-allemande, des représentants de la société civile ont été impliqués pour la première fois. En 2019, le prix De Gaulle-Adenauer, après avoir été longtemps décerné à de grandes institutions ou des célébrités, fut remis à une association de médiation culturelle socio-éducative : Une Terre Culturelle à Marseille. Le Fonds citoyen franco-allemand créé par le traité d’Aix-la-Chapelle subventionne également depuis 2020 des « nouvelles idées et projets de la société civile qui rapprochent les gens (…) des rencontres intergénérationnelles, entre villes et campagne, entre clubs sportifs, des initiatives environnementales ou des projets culturels ».

De tels formats font naître des relations vivantes et permettent une nouvelle culture de la coopération – une collaboration productive des Européens de demain. Les projets en commun, mis en œuvre de manière concrète dans les villes et communes, sont ce que Ralf Dahrendorf avait nommé la « politique étrangère des sociétés ». Les nombreux partenariats communaux développés au fil des ans ou les partenariats d’associations offrent pour cela une bonne base. Ils peuvent adopter de nouvelles fonctions supplémentaires et montrent qu’ils sont capables de bien plus que de simplement organiser des rencontres. Ils peuvent agir comme médiateurs et encourager les contacts qui ne verraient pas le jour sans aide.

Financement de l’échange professionnel

William Falguière, responsable de l’échange pour la formation professionnelle à la Fédération des Associations Franco-Allemandes pour l’Europe (FAFA) a remarqué que les subventions pour des échanges de formation professionnelle ne sont pas utilisées en France, car souvent, les directions des écoles professionnelles ne savent pas où obtenir des informations et comment trouver une école partenaire en Allemagne. Des médiateurs, dans le cadre de jumelages de villes, peuvent ici aider en recherchant des écoles dans la ville partenaire ou en traduisant des documents.

De nouvelles opportunités sont possibles en matière de financement de l’échange professionnel car il existe peu d’offres pour les professionnels non universitaires. Thibaut de Champris, expert en relations franco-allemandes et ancien directeur de l’Institut Français à Mayence, voit un potentiel dans les domaines tels que la boulangerie, l’artisanat d’art ou la restauration. Florian Fangmann, directeur du Centre Français de Berlin, est du même avis. Au Centre Français, de jeunes pâtissiers allemands et français se sont rencontrés et ont travaillé ensemble en cuisine. Malgré des barrières linguistiques, la rencontre fut un succès, raconte M. Fangmann, car le groupe avait des intérêts communs.

Membres de la Commission Franco-Allemande de la Jeunesse, © CFAJ

Nouveaux groupes cibles motivés

De nouveaux groupes cibles motivés forment une base plus grande pour la coopération des sociétés civiles et donc la cohésion européenne. Les jeunes et leurs intérêts y jouent un rôle particulier. Reconnaître ces intérêts et proposer des offres adaptées : voilà l’objectif que s’est fixé la Commission Franco-Allemande de la Jeunesse. Elle offre de nouvelles voies de communication sur Internet et a également fait naître un forum intergénérationnel. Une fois par an, il permet de parler de mobilité professionnelle et d’échange intergénérationnel.

Claire Demesmay souligne l’importance de programmes qui intègrent des jeunes issus de l’immigration, car ils ne sont pas encore suffisamment pris en compte. Et pourtant, l’échange et la coopération représentent pour eux spécifiquement une expérience très particulière : ils deviennent ambassadeurs d’un pays vers lequel ont immigré leurs parents ou grands-parents.

Sigrid Scherer est responsable de la fondation à but non lucratif de la banque franco-allemande ODDO BHF AG. Elle a fait des études de lettres modernes et de gestion des organisations à but non lucratif, a vécu en Allemagne et en France et est diplômée de l’École Supérieure de Journalisme de Lille.

Traduction : Amélie Gärtner

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