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Gestion de la crise sanitaire

Une véritable cacophonie

Sophia Bonbon

Cinq ministres-présidents et, en bas à gauche, le ministre fédéral de la Santé, Jens Spahn, © picture alliance/Dpa/dpa

31 décembre 2020

En Allemagne, les 16 Länder ont leurs propres lois en ce qui concerne l’éducation, la radio, la télévision, la police – et la santé. D’où les discordes à gérer le Covid-19 sur le plan fédéral.

Le ministre fédéral de la santé Jens Spahn recommande, requiert, coordonne – mais il ne peut ordonner aucune mesure sanitaire à l’échelle fédérale, ni à l’échelle régionale ni locale. Aussi la ministre fédérale de l’éducation, Anja Karliczek, consulte régulièrement les premiers ministres des États fédéraux et ne peut également qu’exprimer son opinion : elle ne peut pas non plus décider s’il faut ou non fermer des établissements scolaires, y porter un masque pendant les cours ou non (oui, en Bavière à partir de la sixième ; en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, c’est désormais conseillé – après 15 jours d’obligation), etc. Ce sont les Länder et les autorités locales qui décident – assez souvent pour s’affirmer d’un point de vue politique.

Répartitions des tâches

La répartition des tâches dans l’État fédéral et, dans ce cas précis, de la loi sur la protection contre les infections, est au départ de cette situation : la Fédération et chacun des Länder disposent de leur propre constitution, de leurs organes constitutionnels, d’une législation constitutionnelle et de compétences particulières.

Pour débattre d’un problème commun, le Bundesrat, c’est-à-dire le Conseil fédéral, et la Bund-Länder-Kommission rassemblent les représentants des différents gouvernements des Länder – les ministres-présidents ou des mandataires – pour trouver dans la mesure du possible une solution commune aux problèmes. Dans le cas du Covid-19, ils ont pris des décisions régionales voire locales plus souples qu’en France : le système politique – fédéralisme ou centralisme – explique les différences non seulement entre l’Allemagne et la France, mais aussi et surtout entre les Länder.

La densité des régions étant très variable, les mesures doivent, selon les ministres-présidents, être adaptées. Avec 71 habitants au km², le Mecklembourg-Poméranie occidental est le Land le moins densément peuplé et par conséquent la région avec le moins de cas d’infection due au coronavirus. En revanche, la Bavière compte 182 habitants/km2  et dans sa capitale, Munich, vivent 5002 habitants/km2. La Rhénanie-du-Nord–Westphalie, quant à elle, abrite plus de 23 % de la population allemande, soit 18 millions d’habitants. C’est donc le Land le plus peuplé, avec le nombre de cas de coronavirus le plus élevé et un ministre-président, Armin Laschet, qui, en septembre 2021, veut succéder à Angela Merkel comme chancelier. Ses décisions actuelles sont donc suivies de très près.

L’exemple des masques

La chancelière Angela Merkel rencontre régulièrement les 16 ministres-présidents pour trouver une solution commune à la pandémie. En général en vain, au moins en détail. Actuellement, c’est le port du masque, que ce soit dans les établissements scolaires, dans les transports en commun ou dans les magasins, qui provoque de longues heures de débats.

L’amende « minimum » en cas de non-port de masque, où il est prescrit, devrait s’élever à 50 euros. En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, il s’agit toujours de 150 euros dans les transports en communs (et de 50 euros dans un magasin) ; le ministre-président de la Saxe-Anhalt, quant à lui, refuse cependant d’introduire l’amende : dans son Land, tout le monde respecterait les règles.

Les masques cousus à la maison sont autorisés. © Adobe Stock

Alors qu’en France le non-respect du port du masque par exemple dans les transports en commun – et de plus en plus en ville – est sanctionné de 135 euros dans tout l’Hexagone, outre-Rhin, il provoque une véritable cacophonie.

Si l’on « oublie » de porter le masque dans le train tout près de Berlin par exemple, le long des rives de la Havel, au milieu d’un paysage de lacs et de forêts et même dans la capitale du Land, à Potsdam,il n’y aura aucune sanction. Dans le même train continuant son chemin et arrivant à Berlin, il faut porter un masque. Sinon, l’amende est de 50 euros.

Dans le métro à Hambourg, on paye 40 euros sans masque. C’est la ville où habite Udo Lindenberg, le pionnier du rock de langue allemande dans les années 1970,  l’un des piliers de la scène artistique et surtout le symbole du « cool » à l’allemande. « Ce n’est que si nous restons tous cool et que nous suivons les règles que nous pourrons maîtriser la situation », proclame-t-il. Il souhaite vivement « le retour de notre scène culturelle allemande, diversifiée et formidable, le plus rapidement possible » ­– grâce au respect des mesures d’hygiène.

Dans le ICE, le train à grande vitesse, en direction de la Bavière, le masque protège la santé et le portemonnaie. Le Land exige en effet une amende qui peut aller jusqu’à 500 euros si l’on n’y porte pas de masque. De plus, la fameuse fête de la bière Oktoberfest a été annulée à cause de la pandémie ; la décision fut prise sans passer par de longues discussions. Pour Markus Söder, ministre-président de la Bavière, la santé de la population est absolument prioritaire.

Munich n’a pas oublié qu’en 1634, la peste lui fit perdre les deux tiers de sa population.

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