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Les médailles d’Allemagne

Jeux Olympiques 2021

Yasmine Guénard-Monin

© Shutterstock

19 août 2021

Avec dix médailles d’or, onze d’argent et seize de bronze – soit 37 médailles au total – l’Allemagne réalise son pire score depuis 1990 et arrive neuvième, devancée par les Pays-Bas et la France à une médaille d’argent près. Un bilan historiquement mauvais.

Les sourires éclatants et les larmes de joie des athlètes récompensés feraient presque oublier que, dans l’ensemble, la délégation allemande n’a guère lieu de se réjouir de ses résultats à Tokyo. Pour comparaison, elle était arrivée cinquième en 2016 à Rio avec dix-sept médailles d’or, alors même qu’une trentaine de nouvelles disciplines ont été introduites à Tokyo.

Contrairement à leur habitude, les Allemands n’ont pas été récompensés en handball, hockey et football. Des favoris sont repartis bredouille : le champion du monde d’aviron Oliver Zeidler a échoué en demi-finale et Johannes Vetter, qui en 2020 avait réalisé le deuxième meilleur lancer de javelot de l’histoire, a quitté le Japon avec une désolante neuvième place.

Des disciplines solides inébranlées…

L’Allemagne s’est, en revanche, imposée dans plusieurs de ses disciplines fortes. Le canoë-kayak lui a apporté sa première et sa dernière médailles d’or des Jeux. Le 27 juillet, Ricarda Funk a réalisé un slalom sans faute en kayak monoplace. Et le 7 août, le quatuor masculin allemand a fini en tête du 500 mètres en K4. Grâce à cette victoire par équipe, Ronald Rauhe, 39 ans et seize fois champion du monde, est devenu le premier homme de l’histoire à être décoré en sprint en kayak dans cinq Jeux Olympiques, et a conclu en beauté sa carrière de compétition en portant le drapeau de la délégation allemande lors de la cérémonie de clôture. Une médaille d’argent et quatre de bronze ont complété le brillant tableau des canoéistes et kayakistes allemands.

Kayak à quatre : Max Rendschmidt, Ronald Rauhe, Tom Liebscher et Max Lemke avec l’or lors de la remise des médailles. © picture alliance/dpa | Jan Woitas

En équitation, ensuite, les cavalières ont décroché trois médailles d’or et une d’argent. Jessica von Bredow-Werndl et Isabell Werth ont triomphé, repartant chacune avec deux médailles, par équipe et en solo, tandis que Julia Krajewski est la première femme à avoir remporté l’épreuve de concours complet individuel, mixte depuis 1964.

Enfin, en cyclisme sur piste, l’équipe composée de Franziska Brauße, Lisa Brennauer, Lisa Klein et Mieke Kröger a remporté l’or en poursuite… et battu de trois secondes le record du monde. Leurs camarades Lea-Sophie Friedrich et Emma Hinze ont, quant à elles, frôlé l’or en vitesse par équipes, en franchissant la ligne d’arrivée moins d’un dixième de seconde après les Chinoises.

… et des triomphes inhabituels

L’Allemagne s’est aussi distinguée grâce à des disciplines dans lesquelles elle monte rarement sur le podium. Les nageurs et nageuses peuvent ainsi s’enorgueillir de leurs excellents résultats. La première médaille d’or allemande en natation depuis treize ans a été remportée en nage en eau libre 10 km par Florian Wellbrock, déjà champion du monde de l’épreuve et du 1500 m nage libre. Deux médailles de bronze se sont ajoutées au palmarès de l’équipe de natation.

Florian Wellbrock le 5 août 2021, © picture alliance/dpa | Oliver Weiken

Le tennis a apporté une belle surprise, puisque Alexander Zverer, numéro 5 mondial, a éliminé le numéro 1 Novak Djokovic en demi-finale, avant d’écraser le Russe Karen Khachanov et de devenir le premier joueur de tennis allemand sacré champion olympique en individuel.

Mais, globalement, ce sont les femmes qui ont sauvé le bilan. En effet, sur les dix médailles d’or remportées par l’Allemagne, sept l’ont été par des femmes. Avec un bond de sept mètres, Malaika Mihambo, championne du monde en titre, a apporté à l’Allemagne la première médaille d’or en saut en longueur femmes de son histoire. Et Aline Rotter-Focken, qui a couronné sa carrière par un titre en lutte libre, dans la catégorie moins de 76 kg, est la première lutteuse allemande à être décorée aux JO.

Surprise en marche, bon bilan en combat et déception en aviron

Parmi les autres moments marquants, l’émotion de Jonathan Hilbert, qui ne pouvait croire à sa deuxième place au terme de sa marche de 50 km : « C’est fou, je suis incroyablement fier ». Cette médaille est d’autant plus réjouissante que c’était peut-être la dernière occasion pour l’athlète de monter sur un podium olympique, puisque le Comité olympique a rayé la plus longue épreuve de l’athlétisme du programme des Jeux 2024.

Les sports de combat peuvent se targuer d’un beau bilan. Eduard Trippel, deuxième au judo parmi les hommes de moins de 90 kg, a rapporté à l’Allemagne sa première médaille masculine depuis 2012. Les douze judokas allemands ont obtenu le bronze à l’épreuve par équipes mixtes, organisée pour la toute première fois. Et trois autres médailles de bronze ont été décrochées, une en judo et deux en lutte gréco-romaine.

Kristin Pudenz le 2 août 2021, © picture alliance/dpa | Michael Kappeler

En lancer de disque, Kristin Pudenz a défié une pluie battante et surpris en gagnant la première médaille, d’argent, pour une Allemande depuis 25 ans. En aviron, si les rameurs du deux de couple poids léger se sont réjoui de leur deuxième place, l’équipe masculine de huit, qui pouvait prétendre à l’or, a dû se contenter de l’argent, comme en 2016.

Un t-shirt, un plâtre et des combinaisons à strass

Des sportifs se sont distingués sans obtenir de médaille. Pour la première participation du skateboard aux Jeux Olympiques, Tyler Edtmayer a skaté avec un bras dans le plâtre, moins d’une semaine après s’être blessé pendant un entraînement. Dans la joie d’une victoire contre l’Arabie saoudite, le footballeur Max Kruse a retiré son maillot pour dévoiler un t-shirt sur lequel il demandait en mariage sa petite amie, qui le regardait en direct depuis l’Allemagne (elle a dit oui).

Et, sur fond d’une polémique extérieure aux Jeux à propos de la tenue des beach-handballeuses norvégiennes, les gymnastes allemandes ont fait parler d’elles en concourant en combinaison longue. Bien qu’elle soit autorisée, cette tenue reste rare, les sportives lui préférant traditionnellement un justaucorps échancré qui découvre leurs jambes. « Nous voulions montrer que chaque femme, chaque personne, devrait pouvoir décider de ce qu’elle veut porter », a déclaré la gymnaste Elisabeth Seitz.

Scandales en rafale

Cependant, le coup d’éclat des gymnastes a été vite éclipsé par plusieurs événements qui ont assombri les Jeux. Le Comité olympique a eu beau organiser des épreuves à huis clos, reléguant à l’extérieur du stade les Japonais qui manifestaient contre la tenue des Jeux malgré la pandémie, et imposer des mesures draconiennes aux athlètes, le Covid-19 s’est frayé un chemin dans l’enceinte olympique. La délégation allemande a été directement touchée. Le coureur cycliste Simon Geschke, testé positif à la veille de sa première course, a passé les Jeux dans sa chambre d’hôtel. Abattu, le sportif s’est plaint sur Twitter de ses conditions d’enfermement, comparant sa quarantaine à un séjour en prison.

Surtout, deux scandales ont embarrassé la délégation allemande et entraîné l’exclusion de deux coaches des Jeux. Au moment d’encourager un coureur, Patrick Moster, directeur sportif de l’équipe de cyclisme, a tenu des propos racistes envers des adversaires érythréen et algérien. Ses propos ont été immédiatement condamnés par la Fédération de cyclisme et le Comité olympique allemands et Moster s’est excusé – trop tard.

Annika Schleu le 6 août sur Saint Boy, © picture alliance/dpa/Sputnik | Grigory Sysoev

Le comportement de la pentathlète Annika Schleu et de sa coach Kim Raisner lors de l’épreuve d’équitation a fait encore plus de bruit. Alors que la vice-championne du monde était en tête après l’escrime et la natation, elle a tiré au sort un cheval capricieux, Saint Boy, et peiné à le contrôler. Les images montrent l’athlète, en larmes, donner des coups de cravache et de crampons à sa monture, et sa coach frapper Saint Boy du poing.

Disqualifiée de l’épreuve après plusieurs refus d’obstacle, Schleu a fini à la 31e place. Mais son calvaire ne s’est pas arrêté là. Alors que la photo de l’athlète en pleurs était tournée en dérision sur les réseaux sociaux, les critiques se sont déchaînées contre Schleu et Raisner, les accusant de maltraitance, ce dont elles se sont défendues. D’autres ont incriminé le système de tirage au sort, spécificité du pentathlon moderne.

La Fédération allemande d’équitation a ainsi déclaré que « (sa) conception de l’équitation repose sur le partenariat entre l’être humain et l’animal, et non dans le fait de considérer le cheval comme un équipement sportif » et le Comité olympique allemand s’est prononcé en faveur d’une évolution des règles plus soucieuse du bien-être animal et de l’équité entre les athlètes. Le lendemain de l’incident, Kim Raisner, a été licenciée des Jeux par la Fédération internationale de pentathlon moderne, qui a par la suite annoncé réfléchir à une modification de l’épreuve en vue des prochains Jeux.

Une semaine plus tard, l’Association allemande de protection des animaux (Deutscher Tierschutzbund) a annoncé avoir porté plainte contre Schleu et Raisner. Alors que les athlètes sont depuis longtemps rentrés chez eux et que le tintement des médailles olympiques s’efface des mémoires, l’affaire Saint Boy continue de résonner.

Tokyo 2021

La cérémonie officielle d’ouverture des Jeux Olympiques le 23 juillet 2021 à Tokyo, © A. Ricardo / Shutterstock

En 2021, les Jeux Olympiques étaient surtout des jeux télévisés. Sur place, le public était quasiment interdit d’entrée. Les sièges ont été peints en couleur pour apporter un semblant de vie aux stades. Repoussés d’un an à cause de la pandémie, les Jeux de Tokyo ont néanmoins conservé leur appellation de « Jeux Olympiques 2020 » – car tous les logos avaient déjà été produits.  

Les États-Unis ont terminé en tête pour la troisième fois d’affilée, avec 113 médailles, dont 39 d’or. Ils ont été talonnés par la Chine et ses 38 médailles d’or. Le Japon a réalisé le meilleur bilan de son histoire, avec 58 médailles au total, ce qui a permis au pays hôte de finir troisième pour la première fois depuis 1968. 

Au 5e rang, derrière la Grande-Bretagne, un mystérieux acronyme, « ROC ». Derrière le « Russian olympic committee » se cache la Russie, suspendue des JO par le Comité international olympique (CIO) à la suite d’un scandale de dopage d’État à Sotchi en 2014. L’interdiction d’expliciter l’acronyme a été peu respectée et les sportifs ont été autorisés à concourir en blanc bleu rouge et à brandir un drapeau qui rappelait celui, retourné à 90 degrés, de leur pays.

Les délégations se sont partagé 339 médailles d’or, un nombre record. Quatre sports ont fait leur entrée : le surf, l’escalade, le karaté et le skateboard. Le baseball et le softball sont revenus après avoir été rayés du programme en 2012 et 2016. De nouvelles épreuves sont apparues, comme le basket trois contre trois et le relais mixte en natation et en athlétisme.

Des records ont été franchis dans quasiment toutes les courses. Les chaussures à lame de carbone et le revêtement high-tech des pistes ne suffisent pas à l’expliquer. Certains sceptiques attirent l’attention sur l’interruption des contrôles antidopage pendant le confinement. 

L’Italien Gianmarco Tamberi et le Qatari Mutaz Essa Barshim ont assuré un véritable moment olympique. Arrivés à égalité lors de la finale de saut en hauteur après avoir franchi 2,37 mètres, les deux athlètes se sont mis d’accord pour se partager l’or. 

La sprinteuse américaine Allyson Felix a prouvé à son ex-sponsor, qui avait baissé sa rémunération pendant sa grossesse, que l’on pouvait être à la fois une mère et une athlète de première classe. En empochant le bronze au 400 m et l’or au relais 4×400 m, elle est devenue, avec onze médailles olympiques en tout, la deuxième athlète la plus titrée de l’histoire des JO. 

En pleine compétition, la sprinteuse Krystsina Tsimanouskaya a reçu l’ordre de retourner en Biélorussie. Elle avait critiqué les instances sportives de son pays. La police japonaise l’a escortée à l’aéroport, où elle s’est envolée vers la Pologne, qui lui avait accordé un visa humanitaire. Le CIO a ouvert une enquête sur l’affaire et sanctionné deux entraîneurs biélorusses.

La star américaine de la gymnastique Simone Biles s’est retirée, à la surprise générale, d’une finale par équipe et a annoncé ne plus pouvoir concourir pour des raisons psychologiques – un sujet tabou dans le monde du sport. Elle a finalement réussi à revenir dans la compétition et décroché le bronze en poutre. 

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